Les Belges, leur histoire ...

et celle de leur patrie, la Belgique

Au 19e siècle, majorité et opposition font et défont les lois …


La loi organique de 1842, dite Loi Nothomb

En 1842, un cabinet mixte, dirigé par l’unioniste Jean-Baptiste Nothomb, avait voulu sortir de cet état d’anarchie. Il avait obtenu des Chambres le vote de la première loi organique de l’enseignement primaire.

  • Cette loi obligeait chaque commune à entretenir au moins une école primaire publique ou à adopter une école confessionnelle si celle-ci réunissait les conditions légales.
  • L’enseignement de la religion catholique (catéchisme et histoire sainte), considérée comme inséparable de la morale, était obligatoire, sauf pour les élèves professant un autre culte reconnu (protestant ou israélite).
  • Cet enseignement religieux, donné par l’instituteur, devait être inspecté par le clergé.

La loi du 30 août 1842 avait un caractère confessionnel. Elle représentait néanmoins un très sérieux effort de conciliation. Elle était « dans les mœurs du pays » et la Chambre l’avait acceptée à l’unanimité moins 3 voix (dont celle de Théodore Verhaegen).

Jean-Baptiste Nothomb Théodore Verhaegen
Jean-Baptiste Nothomb   
La Belgique centenaire, p. 146
Théodore Verhaegen  
Un passé pour 10 millions de Belges, p. 114

La loi de 1879, dite Loi Van Humbeek ou "Loi de malheur"

Les libéraux de 1878, talonnés par ceux d’entre eux qui prétendaient mettre « le prêtre hors de l’école », voulurent supprimer la loi de 1842 et poser une affirmation de principe.

La loi Van Humbeek du 10 juin 1879 :

  • Institua au moins une école primaire publique par commune
  • L’enseignement de la religion pouvait être donné par des prêtres, à l’école, mais seulement sur la demande des parents et en dehors des heures de classe.
  • Le gouvernement nommait les inspecteurs, approuvait les programmes et les livres scolaires
  • L’Etat se réservait le monopole de l’enseignement normal
  • Les instituteurs, nommés par les communes, devaient être en possession d’un certificat régulier d’études.

Cette loi centralisatrice et laïque, appelée « loi de malheur », déchaîna une âpre guerre scolaire, surtout en Flandre.

  • Les catholiques fondèrent une quantité d’écoles confessionnelles vers lesquelles émigrèrent, en moins de 2 ans, 190.000 enfants (c’est-à-dire 66% des élèves) et 1.340 membres du personnel.
  • Le clergé excommunia les défenseurs de l’école officielle
  • Cette position du clergé belge fut prudemment appuyée par le pape Léon XIII, esprit très fin qui invitait les catholiques belges à ne plus s’éloigner du respect de la Constitution, même au plus fort de la lutte.
  • En 1880, le gouvernement rompit ses relations diplomatiques avec le Vatican.

Le Cabinet Frère-Orban tint bon mais sa victoire fut stérile.

Au fur et à mesure que le gouvernement édifiait des écoles officielles, la population des écoles libres croissait en nombre. Or, cette entreprise coûtait fort cher. Le ministre des Finances, Charles Graux, placé devant un déficit de 25 millions de francs (19 millions d’augmentation en 2 ans de temps), se voyait obligé d’établir une série de nouveaux impôts. Le Cabinet devint très impopulaire.

Pierre Van Humbeek Instituteur dans une école villageoise Léon XIII
Pierre Van Humbeek  
Instituteur dans une école villageoise  
Chronologie de la Belgique de 1830 à nos jours, p. 112
Le pape Léon XIII  
Wikipedia

La loi de 1884, dite Loi Jacobs

Les élections du 10 juin 1884 furent un désastre pour les libéraux. Ils furent écrasés et écartés du gouvernement pendant 30 ans.

Un cabinet homogène sous la direction du catholique Jules Malou fut constitué. Le gouvernement commença par anéantir l’œuvre scolaire des libéraux. La troisième loi organique de l’enseignement primaire, dite loi Jacobs du 30 août 1884, dépouilla l’Etat de son monopole scolaire.

  • Les communes furent autorisées à remplacer l’école neutre par une école libre (appelée « école adoptée »). La demande de 20 pères de famille suffisait pour opérer ce changement.
  • La loi admettait que l’enseignement pourrait être donné sans diplôme
  • L’enseignement religieux figurait au programme, mais pas au nombre des matières obligatoires
  • L’enseignement normal devenait libre

Cette loi eut pour conséquence la suppression de nombreuses écoles publiques et la création d’écoles catholiques avec personnel laïque ou congréganiste. Il y eut désormais un enseignement normal hétérogène : de l’Etat, provincial, communal, épiscopal, congréganiste.

Victor Jacobs
Victor Jacobs

Source : La Patrie belge. 1830-1930, p. 71

La loi scolaire de 1895, dite Loi Schollaert

Les catholiques voulaient détruire les derniers vestiges du régime scolaire de 1879.

En 1895, François Schollaert, ministre de l’Intérieur et de l’Instruction Publique, fit voter une quatrième loi organique de l’enseignement primaire, d’un caractère ouvertement confessionnel :

  • Toute école libre obéissant à certaines modestes conditions légales, devenait adoptable et recevait des subsides gouvernementaux au même titre que les écoles officielles et adoptées
  • L’enseignement de la religion devenait obligatoire ; le père de famille qui désirait en dispenser ses enfants devait remplir un formulaire spécial
  • Bien qu’il y eut à ce moment encore 32% d’illettrés en Belgique, la nouvelle loi n’envisageait pas de rendre l’enseignement obligatoire.

La loi du 15 septembre 1895 contribua à aigrir les rapports entre le gouvernement, les petites villes et les campagnes, d’une part, les centres industriels et les grandes villes démocratiques de l’autre. Ces dernières jouissaient d’une puissante autonomie et n’étaient nullement disposées à capituler devant l’Etat.

Le projet du « bon scolaire »

A nouveau chef du gouvernement entre 1908 et 1911, Schollaert se risqua à mettre en avant un nouveau projet de loi scolaire dans le but de placer sur le pied de la plus parfaite égalité les écoles libres et les écoles officielles. En 1911, 45 % de la population scolaire fréquentait les écoles libres. Le gouvernement invoqua ce fait pour vouloir contraindre les provinces et les communes à donner aux écoles congréganistes et aux écoles publiques des subsides proportionnés au nombre de leurs élèves par le régime du « bon scolaire ».

Aussitôt les Gauches formèrent un bloc de résistance et de tempétueux meetings furent organisés dans les grandes villes.

C’était la première fois que le roi Albert 1er se trouvait devant une situation tendue. Prudent, il se garda d’encourager le Premier dans son entreprise aventureuse. Schollaert démissionna en juin et eut pour successeur Charles de Broqueville qui laissa tomber le projet du bon scolaire.

Albert 1er Frans Schollaert Charles de Broqueville
Albert 1er  
La Belgique, histoire et culture
Frans Schollaert  
La Belgique centenaire
Charles de Broqueville  
La Belgique centenaire
Guerre scolaire