La société carolingienne
La société carolingienne se caractérise par la prédominance d’une aristocratie foncière de leudes, à côté de laquelle il convient de faire figurer les communautés ecclésiastiques et leurs immenses domaines.
Villa carolingienne
Source : Charlemagne (G. Bordonove)
Le grand domaine a tous les caractères de la villa gallo-romaine. Il comprend :
- La demeure du leude : elle a l’aspect d’une puissante ferme fortifiée entourée de fossés et de palissades
- Le domaine du leude : la réserve seigneuriale n’est plus cultivée par des esclaves mais par des serfs fixés héréditairement au sol
- Aux alentours, des tenures de 10 à 12 hectares (les manses), exploitées par des fermiers nommés « tenanciers ». Ils doivent au maître un cens (céréales, légumes, œufs, volaille) et des corvées (prestations en travail sur la réserve seigneuriale ou dans l’intérêt commun).
En bon propriétaire, Charlemagne surveille de très près l’exploitation et l’entretien de ses propres domaines. Ils sont équipés pour se suffire à eux-mêmes et être à mêmes de fournir tout ce dont les habitants ont besoin. Voici un extrait du capitulaire « De Villis », qui traite de manière très détaillée de l’organisation d’un domaine agricole :
« Nous voulons que nos serviteurs soient bien traités et que personne ne les réduise à la pauvreté (…). Que nos intendants se trouvent à l’endroit assigné et donnent des instructions pour la conduite des travaux, pour que tout y soit mené à bonne fin (…). Il faut veiller avec beaucoup de soin à ce que le lard, les viandes salées ou séchées, le vinaigre, la piquette, le vin cuit, la moutarde, le fromage, le beurre, le malt, la bière, l’hydromel, le miel, la cire, la farine soient faits et préparés avec une extrême propreté. Que personne ne foule la vendange avec les pieds (…) »
Suit une énumération de plantes devant être cultivées dans les jardins, potagers et vergers :
« Des lis, des roses, de la sauge, des concombres, des melons, des citrouilles, des haricots, du romarin, des pois chiches d’Italie, de la chicorée, de la menthe, des pavots, des betteraves, des mauves, des choux, des radis, des oignons, de l’ail, des fèves, du cerfeuil (…) ». En tout, 70 espèces.
« Pour les arbres, il y aura des pommiers de races différentes, des poiriers, des sorbiers, des châtaigniers, des pêchers, des cognassiers, des amandiers, des mûriers, des lauriers, des figuiers, des noyers, des cerisiers (…) »
Mais, comme partout ailleurs en Europe, la misère guettait sous la forme des 3 grandes calamités du Moyen âge :
- La famine
- La peste
- La guerre
Si ces maux n’étaient pas nouveaux au Moyen âge, il était néanmoins surprenant qu’un prince se soucie de les combattre. Ainsi, dans une lettre qu’il fait écrire à l’évêque de Liège, Charlemagne recommande le jeûne général et la pratique de l’aumône car
« Nous avons appris, par certains de nos fidèles, qui nous l’ont fait savoir des diverses parties de notre royaume que, de façon insolite et plus que de coutume, la terre est partout stérile et que le péril de la famine menace, les intempéries sont très défavorables aux récoltes, des épidémies sévissent en certains lieux, les guerres ne cessent pas chez les peuples païens vivant à nos frontières … ».