Les Belges, leur histoire ...

et celle de leur patrie, la Belgique

La Belgique sous l’occupation allemande

Troupes allemandes sur la grand-place de Bruxelles
Troupes allemandes sur la grand-place de Bruxelles

Source : Bruxelles où est le temps, p. 256

Dès leur entrée en Belgique, les allemands avaient signalé partout leur passage par des crimes. Ils avaient pillé et incendié des bourgs et des villages, massacré des citoyens paisibles et fusillé des otages. Ils avaient pratiqué le système odieux de la répression collective. Ce système avait été froidement organisé dans le but de vaincre la résistance matérielle et morale des Belges. Cette terreur militaire dura une quinzaine de jours (de la fin août au début de septembre 1914) et provoqua une panique dans la population : plus d’un million de réfugiés passèrent en France, en Angleterre et aux Pays-Bas.

Exode de 1914
L’exode de 1914

Source : La Patrie belge, 1830-1930, p. 143

Pour se défendre de leurs actes, les Allemands invoquèrent le devoir de se défendre contre de prétendus francs-tireurs. Par la suite, le directeur du Bureau politique de Bruxelles pendant l’occupation reconnut qu’il y avait eu une « légende des francs-tireurs ».

Dès la fin du mois d’août, une administration allemande est mise en place qui laisse subsister certaines institutions belges à côté d’organismes nouveaux entièrement allemands. Le pays occupé passe sous l’autorité d’un gouverneur général. Durant 4 années, la Belgique a subi une domination étouffante. Toutes les libertés qui faisaient autrefois son orgueil avaient été supprimées. La censure avait tué la liberté de la presse. Au point de vue économique, la Belgique fut complètement dépouillée :

  • Magasins et fabriques furent vidés
  • Cuivres, laines, bétail, chevaux furent réquisitionnés
  • À partir de 1917, une centrale de démontage fit transporter en Allemagne ou détruire systématiquement les machines et les usines du pays de Liège et de Charleroi. La sidérurgie spécialement fut ruinée selon les règles d’une méthode implacable. Le but de l’ennemi était de miner, dans l’éventualité d’une « paix blanche », sans vainqueurs ni vaincus, une puissance économique qui pouvait redevenir une concurrente.
  • Chaque mois, les provinces devaient payer d’énormes contributions, prétendument pour l’entretien des troupes d’occupation.

La question du ravitaillement de la population devint rapidement préoccupante. Il ne faisait aucun doute que la population aurait été décimée par la famine si des mesures énergiques n’avaient été prises pour lui venir en aide :

  • Ernest Solvay et Emile Francqui organisèrent un « Comité National de Secours et d’Alimentation »
  • Grâce au concours direct des Etats-Unis et au dévouement de leur ministre à Bruxelles, Brand-Whitlock, une « Commission for relief » américaine (= commission d’assistance et d’aide) acheta du blé, des denrées alimentaires, et les importa dans les régions occupées. Le Comité National s’employa à la répartition et à la distribution de ces secours.

Ernest Solvay Emile Francqui Brand Whitlock Distribution de soupe en 1916
Ernest Solvay  
Wikipedia

Emile Francqui  
Histoire de la Belgique en mots et en images, p. 166

Brand Whitlock 

Distribution de soupe  
Bruxelles, où est le temps, p. 364


A partir de 1917, la Commission for relief américaine fut, par suite de la participation des Etats-Unis à la guerre, remplacée par un Comité hispano-néerlandais.

Le travail forcé et les déportations

Pendant le cruel hiver 1916-1917, les allemands déportèrent les ouvriers belges sous prétexte de réagir contre le chômage.

  • 120.000 personnes, dont beaucoup de femmes, furent enrôlées de force dans les « Zivil Arbeiter Bataillonnen »
  • 60.000 ouvriers prirent le chemin de l’Allemagne
  • Les autres durent travailler dans les « étapes » (territoires militaires situés à une certaine distance à l’arrière du front des opérations) et même immédiatement derrière le front.

La « Flamenpolitik »

Depuis la fin de l’année 1914, l’Allemagne cherche à exploiter les divergences entre Flamands et Wallons pour obtenir en Flandre un point d’appui à sa politique. Heureusement, le Mouvement Flamand est divisé et la majorité n’est pas prête à collaborer avec l’occupant. C’est ainsi qu’on trouve en Flandre :

Henri Pirenne
Henri Pirenne

Source : Wikipedia

  • Des « passivistes », qui sont les plus nombreux. Ils estiment qu’il faut régler le problème flamand entre Belges à la fin de la guerre
  • Un courant de « frontistes ». Il se développe dans l’armée autour d’intellectuels et de prêtres engagés volontaires. Ils trouvent des adeptes dans une armée où les Flamands constituent les 2/3 de l’infanterie et où le français reste la langue de commandement. Mais le but de ce mouvement vise surtout à se faire entendre par le Roi et le gouvernement afin d’obtenir la flamandisation de la vie publique et une autonomie administrative.
  • Des « activistes » de la Belgique occupée sont les seuls à miser sur une victoire allemande. Ils pensent qu’il faut profiter des circonstances pour obtenir satisfaction à leurs revendications. Ils sont une minorité et comprennent surtout des intellectuels désapprouvés par la masse de l’opinion flamande.

En octobre 1916, l’Allemagne exploite le contentieux linguistique en ouvrant l’université flamande de Gand (jusque là francophone). Des professeurs qui refusent de faire le jeu des Allemands sont déportés. Ce fut également le cas du recteur, l’historien Henri Pirenne.

En février 1917, les activistes, placés sous la protection de la police allemande, créent un Conseil de Flandre qui doit jouer un rôle consultatif. Un mois plus tard, le gouverneur général proclame la séparation administrative de la Flandre et de la Wallonie avec respectivement Bruxelles et Namur comme capitale. A cette occasion, la frontière linguistique devient une frontière politique. Les ministères belges sont dédoublés :

  • A Bruxelles, les postes sont occupés par des activistes
  • A Namur, l’administration est à créer de toutes pièces, surtout avec du personnel allemand car les Wallons n’acceptent aucun poste à responsabilité.

Au cours de l’année 1918, le Conseil de Flandre est associé à l’autorité allemande ; il tient sa dernière réunion le 25 octobre. A la fin de la guerre, beaucoup d’activistes prennent le chemin de l’exil en Allemagne.

Belgique dans la première guerre mondiale