Les Belges, leur histoire ...

et celle de leur patrie, la Belgique

Les différends entre le gouvernement et le Roi


Les points de vue divergents qui s’étaient déjà manifestés pour des questions de politique intérieure, vont s’exacerber lorsqu’il s’agira de diriger le pays alors qu’il est confronté aux évènements tragiques de la Seconde Guerre mondiale. Chacun des « protagonistes » a certes d’excellentes raisons pour justifier ses actes, mais leur manque de compréhension et de confiance réciproque sera néfaste au pays et l’entraînera sur une voie peu glorieuse.

Il ne nous appartient pas de juger du bien fondé des analyses des uns et des autres. Aussi nous bornerons nous à citer quelques actes qui ont alimenté la controverse et qui seront exploités après la guerre pour mener inéluctablement à la « Question Royale ».

Léopold III chef de l'armée
Le roi, chef de l’armée

Source : 150 ans de vie politique

Le commandement de l’armée

  • Le 10 mai 1940, lorsque l’Allemagne envahit la Belgique, le Roi prend le commandement de l’armée, conformément à l’article 68 de la Constitution qui stipule « le Roi commande les forces de terre et de mer, déclare la guerre, fait les traités de paix, d’alliance et de commerce ». Il s’adresse à la population en proclamant : « Comme mon père le fit en 1914, je me suis mis à la tête de notre armée, avec la même foi, avec la même confiance ».
  • Lorsque la situation prend une tournure désespérée, le Premier Ministre reproche au Roi d’avoir agi de manière inconstitutionnelle puisque, selon l’article 64 de la Constitution, « aucun acte du Roi ne peut avoir d’effet s’il n’est contresigné par un ministre, qui, par cela seul, s’en rend responsable »

La place du Roi

  • Les ministres estiment que la qualité de Chef d’Etat prime sur celle de chef de l’armée et que par conséquent, le Roi ne peut être fait prisonnier. En cas d’encerclement de l’armée belge, le Roi doit abandonner ses soldats. Les ministres somment le roi de quitter le pays et de continuer la guerre avec les alliés.
  • Le Roi insiste sur son devoir. Il considère que son honneur exige de ne pas abandonner ses troupes et de partager leur sort. Par ailleurs, en restant en Belgique, il est persuadé de pouvoir mieux protéger son peuple contre les rigueurs de l’occupation.

Dans le cadre de cette controverse, il nous a semblé utile de rapporter ici l'analyse effectuée par l'historien britannique Liddell Hart, publiée dans l'Express du 21 avril 1960 :

"Si le Roi Léopold avait quitté la Belgique dès le 25 mai 1940, comme ses ministres et Chruchill l'y poussaient, l'armée belge eût sans doute immédiatement déposé les armes et les chances des Anglais d'échapper à l'encerclement eussent été minces. On peut donc soutenir raisonnablement que l'armée anglaise a été sauvée par le Roi Léopold - qui devait être, par la suite, si sévèrement jugé en Angleterre comme en France"

Léopold III signe la capitulation en 1940
Léopold III signe la capitulation de la Belgique

La capitulation après 18 jours

  • Le 27 mai 1940, l’armée belge est arrivée à l’extrême limite de la résistance. Pour éviter des sacrifices qui n’auront désormais plus aucune utilité, le roi décide de capituler le lendemain. Il devra accepter une reddition sans condition. Il est assigné à résidence dans son château de Laeken et se considère comme un prisonnier de guerre.
  • Réfugié en France, le gouvernement belge désavoue l’attitude de Léopold III. Par un discours radiodiffusé, le Premier Ministre Pierlot déclare que le roi est tombé sous le pouvoir de l’occupant et qu’il est temporairement dans l’incapacité de régner. Il annonce que le gouvernement a l’intention de poursuivre la lutte aux côtés des Alliés.
  • L’opinion publique perçoit le roi comme celui qui a sauvé des milliers de vies

Une rencontre avec Hitler à Berchtesgaden

Cette entrevue, sollicitée par Hitler, eut lieu le 19 novembre 1940 en présence d’un interprète. Léopold III y plaida :

  • Le retour de tous les prisonniers de guerre, y compris les Wallons
  • L’augmentation de la ration alimentaire des Belges
  • Une promesse d’indépendance de la Belgique dans l’organisation de l’après-guerre.

Le Führer ne donna aucune suite à cet entretien. Au contraire, il continua son œuvre de déstabilisation en poursuivant sa « Flamenpolitik » au détriment des Wallons.

Après cette tentative manquée, le roi renonça à agir de quelle que manière que ce soit. C’est ainsi qu’il ne cherchera ni à encourager la Résistance ni à freiner la collaboration.

Lilian Baels
Lilian Baels

Le mariage du roi

Alors qu’il se proclame prisonnier de guerre, Léopold III épouse religieusement, le 11 septembre 1941, dans le plus grand secret, Lilian Baels, fille du gouverneur de Flandre occidentale. Le mariage civil ne sera célébré que 3 mois plus tard, le 6 décembre, en contradiction avec la Constitution belge qui prévoit l’antériorité du mariage civil sur la célébration religieuse.

Le mariage royal n’est rendu public que le 7 décembre 1941 par l’intermédiaire d’une lettre pastorale du Cardinal Van Roey lue dans toutes les paroisses.

La population est bouleversée car elle n’a pas encore terminé le deuil de la reine Astrid. D’autre part, dans les provinces wallonnes, les épouses de prisonniers déportés en Allemagne prennent conscience que Léopold ne partage pas tellement le sort de leurs maris maltraités et affamés.

Règne de Léopold III