Les Pippinides
Puissante famille d’aristocratie terrienne d’Austrasie, les Pippinides possèdent d’immenses domaines s’étendant de la Meuse à la Moselle et du Pays de Herve au Condroz.
Pépin de Landen, dit Pépin l’Ancien (580-640)
Pépin de Landen
Premier ancêtre connu de la dynastie, il possédait le plus gros de ses domaines dans le pays mosan. Il sera maire du palais de 615 à 629 et ensuite de 639 à 640. La raison de cette « pause-carrière » remonte à Dagobert 1er. Pépin de Landen était l’un de ses conseillers mais le monarque l’a écarté pour calmer ses prétentions. Il sera rappelé à la cour en 639 à la demande de la régente car les fils de Dagobert 1er étaient trop jeunes pour régner.
Grimoald (615-657)
Fils de Pépin de Landen, il est initialement écarté de la mairie du palais d’Austrasie car, à l’instar de son père, ses ardeurs effrayaient la monarchie. Il parvient toutefois à ses fins en 640 après avoir gagné la confiance de Sigebert III, le fils de Dagobert 1er.
Les faits sont assez nébuleux car relatés de manière différente selon les sources. Il semblerait que, usant de ruse et de machinations, Grimoald réussit à faire adopter son propre fils par Sigebert III et à le faire monter sur le trône en tant que Childebert III L’Adopté. Cette usurpation aurait déplu à Clovis II, frère de Sigebert III et roi de Neustrie, qui aurait fait enlever et exécuter Grimoald et son fils.
Cette première tentative des Pippinides pour substituer leur dynastie à celle des Mérovingiens s’est donc terminée par un échec. Les successeurs de Grimoald agiront avec plus de prudence …
Pépin II de Herstal, dit Pépin le Jeune (645-714)
Pépin de Herstal
Neveu de Grimoald, Pépin de Herstal s’impose en tant que maire du palais en 680. Il restera connu pour sa puissance militaire et politique.
En 687, il conduit les grands propriétaires terriens au combat contre ses rivaux neustriens qu’il bat sévèrement à Tertry, ce qui permet aux Pippinides de s’affirmer comme maîtres incontestés des mairies du palais de tout le royaume Franc (Austrasie, Neustrie et Bourgogne). Après cette réunification, Pépin II impose l’hérédité de la charge de maire du palais. Ensuite il prend le titre de « Dux et Princeps Francorum », duc et prince des Francs. Pépin de Herstal avait désormais les pouvoirs d’un roi mais n’en avait pas le nom. Ce fameux nom, il décida de le laisser à un fantoche : Thierry III. Le roi ne servait plus qu’à dater des actes et des chartes, rien de plus. Pépin n’osa pas réclamer la couronne, peut-être par peur d’avoir à subir le triste sort de son oncle Grimoald … Chat échaudé craint l’eau froide !
Le centre économique et politique du royaume franc fut déplacé du bassin parisien vers celui de la Meuse, du Rhin et de la Moselle.
Charles Martel (690-741)
Fils illégitime de Pépin de Herstal, Charles devient maire du palais en 717. Il entreprit de nombreux combat pour rétablir l’autorité des Pippinides après la régence désastreuse de la veuve de Pépin de Herstal.
Charles réorganisa l’armée, s’empara du roi Chilpéric II qui mourut opportunément en 721, puis tira du monastère de Chelles un jeune enfant, fils de Dagobert III, qu’il fit couronner sous le nom de Thierry IV.
Charles Martel Source : Encyclopédie Alpha |
Thierry IV |
Guerrier invétéré, Charles Martel passa son existence à courir d’un champ de bataille à l’autre :
- Il fit une guerre acharnée contre les Frisons qui constituaient un grave danger pour les Francs
- Il agrandit la Francie vers l’Est battant, coup sur coup, les Saxons, les Alamans de la Souabe et les Bavarois
- Sa victoire à Poitiers en 732 contre les Arabes, le couvrit d’une gloire historique, le fit apparaître comme le sauveur de la chrétienté et renforça le prestige de sa famille. C’est d’ailleurs en raison de ses prouesses lors de ce combat que le surnom de « Martel » lui a été attribué.
Charles Martel exploita à fond sa puissance militaire et agit désormais comme le chef unique de la monarchie franque :
- Il prit des mesures législatives sans consulter personne
- Il rendit lui-même la justice
- Pour solder ses guerres sans recourir à l’impôt et s’attacher de nombreux vassaux, il procéda à une série de sécularisations de biens d’Eglise. De plus, les chefs eurent la jouissance des revenus de riches monastères à titre d’ « abbés laïques » et sans être tenus de séjourner dans leurs abbayes.
Grégoire III
Le pape Grégoire III n’osa pas protester car les Pippinides :
- Appuyaient les missions évangéliques et les conversions chrétiennes purent reprendre
- Ils étaient en mesure de stopper les Lombards qui menaçaient Rome
- Ils permirent à Rome de ne plus dépendre de l’Empire Byzantin
En 737, à la mort du roi Thierry IV, Charles Martel voulut prouver l’inutilité des rois mérovingiens et décida de ne pas choisir de successeur au trône. Il prit donc réellement le pouvoir du royaume franc et régna ainsi en toute illégalité jusqu’à sa mort en 741. Pendant la période de vacance du règne, il fera dater tous les documents officiels de 737.
Pépin III, dit le Bref (715-768)
A la mort de Charles Martel, ses 2 fils se partagent la charge de la mairie du palais conformément à la tradition franque :
- Carloman devient maire du palais d’Austrasie
- Pépin III, dit plus tard Pépin le Bref à cause de sa petite taille, devient maire du palais de Neustrie
Six années durant, les 2 frères régnèrent conjointement, sans se disputer le pouvoir. Ils prirent néanmoins la précaution d’asseoir sur le trône un simulacre de roi : Childéric III.
Pépin devint l’unique maître du royaume lorsque Carloman se fit moine en 747 et lui céda l’Austrasie. Il eut à cœur de gouverner l’Etat avec sagesse et de ranger les Grands à sa cause en leur rendant de nombreux services.
Héritier des ambitions nourries de longue date par ses ascendants, Pépin examina l’opportunité de renverser le pouvoir détenu par les mérovingiens et considéra que le moment était maintenant propice à une telle action. Il fit demander au pape Zacharie : « Qui doit être roi : celui qui en porte seulement le nom et n’a nul pouvoir dans le royaume, ou celui par qui le royaume est gouverné et qui administre toutes les choses ? ». La réponse du pape fut sans équivoque : « Mieux vaut appeler roi celui qui a l’autorité ».
S’étant assuré l’adhésion du pape, Pépin le Bref convoqua, en 751, à Soissons, un collège de leudes. Là, devant les évêques et les Grands, il se fit élire roi et, selon l’ancienne coutume germanique, promener à la ronde debout sur un bouclier, au son des armes entre-heurtées.
La dynastie des Carolingiens venait d’entrer dans l’Histoire !
Ensuite, l’évêque de Mayence, Saint Boniface, vint lui donner solennellement la consécration religieuse avant que le pape ne vienne donner une nouvelle onction au monarque et lui attribuer un titre impérial honorifique.
Pépin le Bref Source : Wikipedia |
Sacre de Pépin le Bref Source : Nos Gloires – J-L Huens |
Cette consécration par l’Eglise entraîne un certain nombre de conséquences :
- Le monarque a maintenant un caractère sacré que n’avait pas le souverain mérovingien
- L’Eglise a légitimé un coup d’Etat
- Ce caractère mystique de la monarchie carolingienne sera transmis à la descendance
- Il est à l’origine de la monarchie de droit divin.
En témoignage de reconnaissance envers la papauté, Pépin le Bref alla vaincre le roi des Lombards et constitua au profit du pape les Etats Pontificaux en 756. Après avoir scellé durablement l’alliance entre l’Eglise et le pouvoir temporel, consolidé les conquêtes de son père et vaincu plusieurs révoltes, Pépin le Bref mourut en 768.
Le royaume sera partagé entre ses 2 fils : Carloman et Charles, qui allait s’illustrer sous le nom de Charlemagne.
Quid du roi mérovingien ?
Childéric III, dernier roi mérovingien, reçut la tonsure et échangea un fantôme de royauté contre les douceurs de la vie monastique à l’abbaye de Saint-Bertin.