La Réforme protestante
Le mouvement humaniste qui soumet tout à la réflexion critique, et l’imprimerie qui met à la disposition de tous les textes sacrés, poussent de nombreux croyants à se poser des questions sur leur foi. Les abus de l’Eglise les choquent et beaucoup souhaitent une réforme de l’Eglise.
En 1517, un moine allemand condamne la vente des indulgences et le catholicisme mondain : une ère de convulsions civiles se prépare …
Les causes de la Réforme sont nombreuses
- Le déclin du prestige de la papauté en raison :
- De la fiscalité pontificale excessive, notamment en ce qui concerne la vente des bénéfices ecclésiastiques et des indulgences
- Du népotisme : les hautes charges étaient trop souvent confiées à des hommes qui n’avaient d’autres titres qu’une naissance illustre. Ces prélats manquaient des vertus sacerdotales et négligeaient de s’instruire des choses de la religion
- Des guerres
- Du cumul de fonctions spirituelles et temporelles,…
- La vie riche et scandaleuse du haut-clergé qui contraste avec la portion congrue du bas-clergé
- La sécularisation des biens de l’Eglise par les princes et les dignitaires qui se rallient au protestantisme
- Les idées défendues par le protestantisme répondent aux nouveaux besoins sur le plan spirituel :
- La justification par la foi
- Le sacerdoce universel
Indulgence accordée en 1521 Source : Wikipedia |
Le pape vend des indulgences Source : Wikipedia |
Comment expliquer le succès de ces idées ?
- Le sacerdoce universel défend l’idée que le sacerdoce n’est pas réservé à une catégorie de « professionnels » mais est accessible à chaque chrétien. Cette idée est défendue à un moment où la société laïque prend le pas sur la société ecclésiastique. Parallèlement à cela, les Etats monarchiques affirment de plus en plus leur indépendance par rapport au pouvoir pontifical.
- La justification par la foi propose une réponse intérieure au problème du salut à une époque où la chrétienté cherche à retrouver un certain équilibre après les événements tragiques qui l’ont perturbée à la fin du Moyen Age
- La crise du 14e siècle
- La Guerre de Cent Ans
- La Guerre des 2 Roses (Angleterre)
- L’effondrement de la puissance bourguignonne
- La menace turque, …
Par ailleurs, la publication de la Bible, facilitée par la mise au point de l’imprimerie, favorise la réflexion individuelle à partir de la lecture des textes.
Les réformateurs
Ils furent plusieurs à entamer cette réflexion individuelle et à disséminer leur interprétation nouvelle de la foi.
Martin Luther (1483-1546)
Martin Luther
Source : La Nouvelle
Encyclopédie, p. 1887
Luther est né en Saxe, dans une région peu développée : on y trouve peu d’écoles, l’imprimerie n’y est pas développée et la civilisation de l’écrit y est donc mal implantée. Malgré ses origines modestes, Luther est envoyé dans différentes écoles et devient docteur en philosophie. Contre la volonté de son père, il embrasse la carrière monastique et s’attachera à observer scrupuleusement la Règle dans l’espoir de garantir son salut.
En 1510, il est envoyé à Rome pour plaider la cause de l’ordre de Saint Augustin auquel il appartient. La mondanité de la cour pontificale qu’il y découvre l’interpelle fortement et suscite son indignation. En 1512, il devient docteur en théologie et cumule des fonctions importantes à Wittenberg. Le problème du salut continue cependant à le hanter et l’amène à développer l’idée que le salut de l’homme réside principalement dans sa foi.
A partir de 1516, il commence à enseigner, avec succès, sa doctrine personnelle.
En 1517, il affiche ses « 95 thèses sur la vertu des indulgences » sur la porte de l’église de Wittenberg ; il y dénonce la vente des réductions de peine en purgatoire.
En 1520, Luther est condamné par la Sorbonne et par les facultés de Cologne et de Louvain. Il rompt avec le pape qui l’excommunie. Peu de temps après, il brûle publiquement la bulle pontificale qui le condamnait comme hérétique. Ne faisant plus partie de l’Eglise catholique, il fonde sa propre religion : le protestantisme luthérien.
Ayant refusé de se rétracter devant la Diète de Worms en 1521, il est mis au ban de l’empire et se tient caché pendant 3 ans au château de Wartburg. C’est là qu’il donna sa fameuse traduction de la Bible en allemand.
Bible annotée de Luther
Source : La Nouvelle Encyclopédie, p. 2418
En 1525, Luther se marie avec une cistercienne défroquée.
De nombreux princes se rallient à la Réforme pour des raisons bassement temporelles, ce qui entraîne son développement rapide en Allemagne. Rien d’étonnant à cela : puisque Luther avait déclaré qu’il n’était plus nécessaire d’obéir à Rome, tous les biens de l’Eglise en Allemagne pouvaient être confisqués. Se rallier à la nouvelle religion permettait de s’approprier les biens des églises et des couvents supprimés …
Parallèlement à ce succès, Luther perd l’appui des humanistes.
La Réforme protestante prend un sens politique en 1529 lorsque les princes luthériens du Saint Empire Romain Germanique élevèrent une protestation contre les décisions de la majorité catholique restée « sourde » aux critiques et aux projets de réforme de certains de ses membres.
Quelques préceptes du luthéranisme
- Prédominance de la foi sur les œuvres
- Suppression du célibat des prêtres
- Suppression du clergé régulier (moines)
- La convocation d’un concile n’est plus un privilège pontifical
- Luther considère que les fidèles doivent lire eux-mêmes la Bible, imprimée dans langue du peuple afin que chacun puisse la comprendre.
Jean Calvin (1509-1564)
Jean Calvin
Source : Encyclopédie
Alpha, p. 1026
Jean Calvin naquit à Noyon, en France. Il étudie la jurisprudence et la théologie et, devenu prêtre humaniste, il développe les idées d’Erasme et de Luther.
Sa doctrine, semblable à celle de Luther mais plus radicale que celle-ci, se distingue par une haine fanatique du culte des saints, une insistance sur la corruption absolue de l’homme et par la prédestination des élus.
En 1533, il est obligé de quitter l’université de Paris parce que sa conversion au protestantisme y a suscité un scandale. Il entreprend alors de nombreux voyages. En 1541, il s’installe à Genève et organise la ville selon ses principes pour en faire un Etat théocratique basé sur un rigorisme excessif.
Calvin imposa à ses adeptes l’acceptation entière de sa doctrine et des mœurs austères d’où tout amusement était banni. Il fit peser un despotisme étroit sur la religion, le gouvernement et la vie privée des Genevois. Son tribunal envoya au supplice les réfractaires et l’université qu’il avait fondée forma d’ardents propagandistes. Les calvinistes, groupés en communautés qui élisaient leurs pasteurs, obéissaient au consistoire suprême.
Une partie de la Suisse, de la France (les huguenots), des Provinces-Unies (les gueux) et de l’Ecosse (les presbytériens) se rallient au calvinisme.
Henri VIII, roi d’Angleterre (1491 -1547)
En Angleterre, le bouleversement religieux eut une origine futile.
Henri VIII
Henri VIII désirait faire annuler son mariage avec Catherine d’Aragon pour épouser Anne Boleyn. Le pape s’y étant refusé, le roi requit l’avis des évêques anglais et ceux-ci l’approuvèrent. Grâce à la servilité du clergé et du parlement, ce prince autoritaire et capricieux devint le chef de l’Eglise d’Angleterre. Il s’empressa de confisquer, pour lui-même et pour ses partisans, les biens des églises et des couvents.
Sa fille, Elisabeth 1ère, consomma la rupture avec Rome et força ses sujets à adhérer à l’Eglise anglicane. Elle réprima cruellement la résistance des Irlandais et persécuta les catholiques anglais. Elle fit même condamner à mort et exécuter sa cousine Marie Stuart, reine d’Ecosse et son héritière présomptive, en qui elle redoutait une rivale.
Ulrich Zwingli (1484-1531)
Ulrich Zwingli
Ulrich Zwingli est un réformateur suisse formé à l’université de Bâle par les soins d’un oncle ecclésiastique. Grand admirateur d’Erasme, il évolue avec la Réforme dès 1519. Cependant, comme humaniste, il souhaite surtout épurer la religion des traditions historiques telles que
- Le culte des saints
- Les images
- Les reliques
- Les processions, …
Dès 1529, il s’oppose à Luther sur la doctrine du salut : il considère que seule l’invincible volonté de Dieu compte. Il considère également l’Eucharistie comme un symbole.