Une politique de centralisation
Les nouveaux souverains souhaitent mettre en place un régime absolutiste moderne ; tous étaient d’ailleurs des "princes éclairés" selon l’esprit du 18e siècle.
Politique intérieure
L’étendue de leur territoire les oblige à gouverner depuis Vienne. Sur place, ils se font représenter par un gouverneur-général qui, à son tour, charge un ministre plénipotentiaire d’assumer la responsabilité de l’administration. A noter que les gouverneurs-généraux sont tous des membres de la famille (voir le schéma généalogique).
Souverains |
Gouverneurs |
Plénipotentiaires |
Charles VI |
Eugène de Savoie Marie-Elisabeth |
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Marie-Thérèse |
Marie-Elisabeth
Marie-Anne et Charles de Lorraine |
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Joseph II |
Marie-Christine et Albert de Saxe-Teschen |
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Léopold II |
Marie-Christine et Albert de Saxe-Teschen |
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Au point de vue intérieur, Charles VI poursuit une politique raisonnable. Il fait mine de respecter les privilèges mais en contourne l’application.
- En 1717, il crée à Vienne le Conseil Suprême des Pays-Bas composé de 4 conseillers dont 2 Belges. Ce Conseil ne relève qu’en dernier ressort de l’administration des provinces belges.
- En 1718, il crée un Conseil d’Etat, composé de nobles et de bourgeois éminents. Il ne s’y traita cependant que des bagatelles
- En 1725, il rétablit les 3 Conseils Collatéraux
Sous le règne de Charles VI, c’était le Marquis de Prié, alors plénipotentiaire, qui détenait les pouvoirs réels. Par ses appels de fonds intempestifs, il provoqua la révolte des métiers bruxellois qui fut à l’origine de l’arrestation des doyens les plus compromis et de l’exécution, en 1719, de François Anneessens reconnu comme étant le principal responsable des émeutes.
Arrestation d’Anneessens Source : Bruxelles, où est le temps, p. 139 |
Cobenzl Source : Un passé pour 10 millions de Belges, p. 87 |
Marie-Thérèse avait, quant à elle, un esprit méthodique tendant vers l’unité administrative et les réformes humanitaires. Elle ne toucha aux institutions belges qu’avec beaucoup de doigté.
- Elle étendit le pouvoir administratif des Etats provinciaux et prolongea leur action par le mécanisme des députations permanentes chargées de régler les affaires courantes selon les décisions de principe prises par les Etats provinciaux
- Pour remédier au grand désordre financier des communes et des provinces, Cobenzl créa une Jointe des administrations et subsides qui :
- mit de l’ordre dans la comptabilité
- amortit les dettes
- réduisit le chiffre des impôts en les répartissant mieux.
Le montant de la recette fiscale tripla en quelques années.
- La justice condamnait au pilori, à la flagellation et à la roue. Marie-Thérèse fit remplacer plusieurs peines afflictives par des peines de prison.
- Quoique pieuse, Marie-Thérèse détestait l’esprit de persécution et ne tolérait pas l’emprise de l’Eglise sur le pouvoir du prince. Elle prit une série de mesures en matière de politique religieuse :
- Elle interdit la publication de bulles pontificales par les évêques sans lettre de placet
- Elle intervint dans la nomination des évêques et des curés
- Elle enleva au clergé le monopole de l’enseignement
- Elle fit surveiller par les autorités communales la tenue des registres paroissiaux de naissance, de mariage et de décès
- Elle interdit les pénitences publiques
- Elle interdit l’entrée des novices dans les ordres avant l’âge de 21 ans
- En 1773, elle fit appliquer le « bref » de Clément XIV supprimant l’ordre des Jésuites et en profita pour garder leurs biens.
Le pape Clément XIV
Joseph II, dont l’esprit était très centralisateur, entendait mettre en harmonie les institutions de ses vastes Etats de façon à en faire les rouages d’une sorte de mécanisme d’horlogerie … Ses réformes vont bousculer toute l’organisation administrative et judiciaire :
- Un Conseil général des Pays-Bas, présidé par le Plénipotentiaire, remplace les 3 Conseils collatéraux
- Les députations permanentes des Etats provinciaux sont supprimées
- Les Pays-Bas autrichiens sont divisés en 9 cercles, dirigés par des intendants et subdivisés en districts sous l’autorité de commissaires d’intendance
- Les anciens tribunaux (seigneuriaux, ecclésiastiques et urbains) sont supprimés et remplacés par une nouvelle hiérarchie judiciaire :
- 64 tribunaux de première instance
- 2 Conseils d’appel (Bruxelles et Luxembourg)
- 1 Conseil Souverain de révision (Bruxelles)
Joseph II promulgua une série de réformes dans le domaine religieux. Croyant sincère, il n’admettait cependant pas que l’Eglise sorte du domaine spirituel et s’affranchisse de l’autorité de l’Etat pour accomplir des tâches relevant des pouvoirs laïques.
- L’Edit de Tolérance mettait fin au régime du catholicisme, religion d’Etat. Il établit la liberté de conscience et de culte pour les protestants dont il souhaitait freiner l’émigration
- Liberté des mariages entre catholiques et réformés
- Mécontent du nombre croissant et de la richesse des monastères, il supprima 163 couvents, c’est-à-dire les ordres contemplatifs considérés comme inutiles.
- Il enleva l’état civil au clergé et institua le mariage civil
- Il fonda un Séminaire Général à Louvain et supprima les séminaires diocésains dans l’espoir de contrôler un clergé coupé de la hiérarchie épiscopale
- Il restreignit le nombre de pèlerinages et de processions
D’autres mesures, excellentes en soi au point de vue des convenances ou de l’hygiène, ne furent pas comprises du menu peuple
Politique extérieure
Charles VI dut accepter, en 1715, le Traité de la Barrière, fort humiliant car il prévoyait l’installation, aux frais des Pays-Bas autrichiens, de 12.000 soldats hollandais dans 8 villes des Pays-Bas autrichiens. Cette « barrière » permit aux Provinces-Unies de se prémunir contre de nouvelles agressions françaises.
Constamment soucieux de faire admettre la Pragmatique Sanction qui désignait sa fille Marie-Thérèse comme future impératrice, il ménagea ses anciens adversaires et flatta les puissances maritimes, même au détriment des intérêts économiques des provinces belges (voir plus loin la dissolution de la Compagnie d’Ostende).
Nonobstant les efforts et les concessions de Charles VI pour régler sa succession, Marie-Thérèse rencontra, dès son avènement, l’opposition de la Prusse et de la France qui refusèrent de reconnaître sa légitimité. Le différend se régla, une fois de plus par les armes et la Belgique redevint le champ de bataille de l’Europe.
Après cette Guerre de Succession d’Autriche, Marie-Thérèse refusa de subvenir à l’entretien des troupes hollandaises incapables d’empêcher les soldats de Louis XV d’apporter une nouvelle fois la guerre dans les Pays-Bas autrichiens. Ensuite, elle conclut une alliance avec la France qui permit aux régions belges de ne plus être le lieu où l’on règle ses comptes pour de nombreuses décennies.
La politique extérieure de Joseph II fut vigoureuse :
Signature du Traité de Fontainebleau
Source : Wikipedia – Siren-Com
- Profitant de ce que les Provinces-Unies étaient en guerre contre l’Angleterre, Joseph II ordonna, en 1782, la démolition des places fortes occupées par les Hollandais qui, privés de logement, évacuèrent pacifiquement le territoire. Le Traité de Fontainebleau (10 novembre 1785) abrogea la Convention de la Barrière. Un terme était mis à une longue vexation insupportable.
- Joseph II tenta aussi de libérer les bouches de l’Escaut par la force afin de rendre à Anvers sa prospérité passée. La médiation de Louis XVI, beau-frère de Joseph II, empêcha la Guerre de la Marmite (un boulet hollandais avait touché une marmite autrichienne !) de prendre de l’extension. L’empereur ne persévéra pas dans sa volonté de libérer l'Escaut et se contenta d’une indemnité de 10.000.000 de florins offerte par les Provinces-Unies. Le Traité de Fontainebleau cité ci-dessus stipula également que l’Escaut resterait fermé.
- Après la Guerre de la Marmite, Joseph II proposa aux Puissances d’échanger les Pays-Bas contre la Bavière. Le duc de Bavière serait devenu souverain des provinces belges avec le titre de Roi de Bourgogne ou d’Austrasie. Ce projet fut rejeté.